janvier 01, 2023
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Du jazz au-delà des frontières

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Pour leur première date parisienne, le Victoria Alexanyan Quartet, accompagné de Carole Marque-Bouaret, a électrisé la scène du Centre culturel arménien Alex Manoogian de l’UGAB. Un savoureux cocktail d'énergie et de tendresse pour un public conquis.

Un collectif soudé

Le 25 novembre, le Victoria Alexanyan Quartet a plongé le public du Centre Culturel Arménien de la rue de Courcelles dans un univers mélangeant mélodies traditionnelles arméniennes, lyrisme et arrangements puissants.

La complicité de ce collectif, composé de Victoria Alexanyan (voix), Matheo Ciesla (batterie), Amin Al Aiedy (basse, oud), et Vincent Poivron (piano), ne fait aucun doute. Et pour ce concert exceptionnel, il était accompagné de la talentueuse joueuse de clarinette et de duduk Carole Marque-Bouaret. Quelques minutes avant le début du concert, Victoria fait attendre son public mais pour de bonnes raisons : “On arrive dans 5 minutes, le temps de se faire des câlins et de se donner de la force”. Un groupe soudé dans la vie, en coulisses et sur scène.

Tradition et modernité

Matheo est le premier à entrer sur scène et fait résonner sa batterie dans une ambiance orientale, voire tribale. Très vite, les autres le rejoignent pour interpréter Hol Ara Yezé, un chant de travail (horovel) que les paysans arméniens chantaient à leur bétail. Dans ce chant, le paysan appelle son bœuf “ma beauté” (de sirun yel) ou encore “mon frère” (axper jan), car l’animal est non seulement une source d’alimentation, mais représente également un espoir pour toute la famille.

Pendant près de deux heures, le Victoria Alexanyan Quartet joue des compositions revisitées de Komitas, Shushikiet Yerangi, qui nous donnent un sentiment de nostalgie mais aussi de surprise. Le groupe interprète ensuite des chants folkloriques modernisés tels que Chem Krna Khagal, Qele Qele, Jur Kuga ou encore Verin Saren. Le groupe dévoile également Spasoum (“l’attente”), une composition décrivant le sentiment d’attente des Arméniens : l’attente du jour où les terres de nos ancêtres seront rendues à l’Arménie, l’attente d’un dirigeant digne, l’attente de la fin de la guerre avec l’Azerbaïdjan… Mais cette composition est surtout un appel à la vie. Le concert s’est conclu par un chant de travail des femmes, appelé Sandi Erg - Khio khio, qui rappelle le rythme pris par les femmes lorsqu’elles battent le blé.

Le sens du détail et de la précision

“On savait que ce serait bien, parce qu’on avait un peu écouté avant, mais on pensait pas que ce serait aussi bien !”, confie Laura après le concert. Une qualité permise grâce à la précision et à l’exigence de Victoria Alexanyan et sa volonté constante d’améliorer son quartet.

Chanteuse de jazz, diplômée du Conservatoire d’Erevan et de Lyon, Victoria Alexanyan quitte son Arménie natale à l’âge de 15 ans pour son pays de cœur, la France. Passionnée par la culture française, elle dévoile en 2021 son premier EP, Dans ma maison, un hommage à la chanson française où elle interprète avec le pianiste Sébastien Jaudon les chansons de Prévert, Gainsbourg, Aznavour ou Piaf. Avec son nouveau quartet, elle s’intéresse davantage à ses racines et au répertoire folklorique arménien. Son prochain album est prévu pour 2023.

Carole Marque-Bouaret est chanteuse, clarinettiste, joueuse de Duduk et de baglama. Depuis 2007, elle se rend régulièrement à Istanbul, tombe très rapidement sous le charme de la clarinette turque (en sol) et rencontre Selim Sesler et son fils Ramazan Sesler avec qui elle l’étudiera. Lors d'un voyage en Arménie, elle rencontre Arsen Petrosyan, joueur de Duduk avec qui elle va également travailler. Elle fonde à Lyon son premier groupe de musique turque Mendiliz avec qui elle se produit pendant deux ans, puis crée le groupe Mahaleb en 2015 avec qui elle enregistre son premier album en 2020.​ Carole Marque-Bouaret est titulaire du diplôme d’État de clarinette et de formation musicale, enseigne la clarinette et dirige des ateliers de musique traditionnelle à l'ENM de Villeurbanne et au CRC de Meyzieu.

Cet article a été publié dans les Nouvelles d'Arménie Magazine n°302