janvier 01, 2021
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Des bénévoles engagés pour l’Arménie

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Dès les premiers jours du conflit opposant la République d’Arménie à l’Azerbaïdjan, la diaspora arménienne du monde entier s’est unie, dans un extraordinaire élan de solidarité, pour soutenir les populations de la République du Haut-Karabakh. De cet élan est née l’envie, pour plusieurs jeunes de la région parisienne, de partir en Arménie afin de soutenir les familles déplacées en leur apportant réconfort, soutien moral et aide humanitaire d’urgence.

Après plusieurs semaines de préparation, d’organisation et de recherche de fonds, une vingtaine de volontaires s’est envolée pour Erevan, du 14 novembre au 8 décembre, pour effectuer plusieurs missions en étroite collaboration avec les équipes de l’UGAB en Arménie. Parmi ces bénévoles, la plupart sont des alumni du programme humanitaire et social Arménie, Terre de Vie de l’UGAB. « Cet été, le programme n’a pas eu lieu car nous l’organisons tous les deux ans. Mais pour nous, il était important de continuer à le faire vivre et encore plus dans ces temps difficiles car il prend tout son sens et toute sa dimension humanitaire. Nous avons voulu nous engager de manière forte, réunir des bénévoles ayant participé à une ou plusieurs éditions du programme et créer ensemble un mouvement de solidarité, donnant envie à la jeunesse arménienne de France mais aussi du monde entier de s’engager directement auprès des populations locales », nous explique l’équipe organisatrice du programme.

Au total, pas moins de 30 000 euros ont été levés par les bénévoles participant au voyage, par le biais de crowdfundings sur des plateformes en ligne telles que HelloAsso ou encore Paypal. S’ajoutent à ce montant 10 000 euros restants du programme Arménie, Terre de Vie et 20 000 euros de l’UGAB France, en soutient à l’initiative de ce groupe de volontaires.

Une aide alimentaire

Après une première journée de réunions pour organiser le planning des bénévoles, le séjour commence par une première mission : la préparation de colis et de sacs alimentaires et hygiéniques pour les familles déplacées d’Artsakh, dans les locaux de l’UGAB Arménie. Ces cartons alimentaires se composent d’aliments non périssables : pâtes, riz, confiture, gaufres, café, thé, huile, sucre, farine ou encore conserves de légumes. En plus de ce carton, un sac de produits d’hygiène composé de savon, dentifrice, liquide vaisselle, papier toilette et gel douche. Enfin, un sac de produits alimentaires frais est aussi préparé, contenant des poulets, du beurre et du fromage provenant de différentes fermes de la région du Tavush, acheté en coordination avec le Fonds Arménien de France. Au total, durant leur séjour, ce sont plus de 600 cartons qui ont été préparés, pour une valeur totale de 30 000 euros, puis distribués par les bénévoles à différentes familles d’Artsakh, dans les municipalités de Goris, Nor Geghi, Kasakh et Gavar. « Cela représente une aide pour plus de 3 000 personnes, pour environ un mois. Cela nous a pris quatre jours à tout préparer, à charger dans les camions et à distribuer. En peu de temps, nous voyons que nous pouvons apporter une aide concrète. Ces personnes sont sensibles à notre action. Nous essayons d’avoir toujours un petit mot pour eux pour leur montrer qu’ils ne sont pas seuls », nous confie Dikris Gregorian, ancienne organisatrice d’Arménie, Terre de Vie et bénévole du voyage.

Distribution de vêtements chauds pour l’hiver

Avec eux, les bénévoles ont aussi apporté plus de trente valises de vêtements pour les populations déplacées : manteaux, pantalons, pulls, tee-shirts, chaussures, bonnets, gants, écharpes, vêtements pour bébés… Le plus souvent, ces familles sont parties avec le strict minimum, n’emportant parfois avec eux qu’une valise pour une famille entière. Grâce à la générosité de la diaspora, près de 700 kilos de vêtements ont ainsi été distribués à Goris, Gavar et Erevan. Une aide symbolique, permettant à quelques familles d’affronter l’hiver de façon plus sereine.

Des cadeaux, pour toute la famille

Grâce aux fonds levés, les bénévoles ont souhaité investir dans des kits à destination des familles. Pour les enfants, un kit scolaire complet, composé de cahiers, trousse, carnet de coloriage, feutres, crayons de couleurs…. Et bien sûr, un sachet de chocolats de la célèbre enseigne Grand Candy. Pour les femmes, un kit de soin avec une crème pour les mains, un set de manucure… Pour les hommes, un kit comprenant rasoir, mousse à raser et peigne… « Avec ces petits cadeaux, nous avons voulu leur apporter du réconfort. Ce geste peut paraître anodin dans cette période où la priorité reste l’alimentation et le logement. Mais les familles ont été touchées de cette attention particulière », nous raconte Laura Bal, bénévole du voyage. Ces kits ont été distribués lors de journées d’animation à destination des enfants, à Goris, à Jrvezh et au Centre Vahe Karapetian de l’UGAB, mis à disposition pour les familles d’Artsakh. Au programme de ces journées : spectacle des enfants du Centre Nork, jeux avec des animateurs, chant, danse… Des moments de partage forts, permettant aux enfants et aux parents d’oublier, l’espace de quelques heures, la difficulté de la vie quotidienne.

Rencontre avec des familles

Avec l’équipe de l’émission Quotidien, diffusée sur la chaîne TMC, les bénévoles se sont rendus dans la ville de Getamech, afin d’y rencontrer 3 familles logées par la municipalité dans des appartements mis à leur disposition. Avec ces familles, les bénévoles ont eu l’occasion d’entendre des témoignages bouleversants. Elles se sont confiées sur leur histoire : le départ précipité de la ville de Hadrout, les bombardements, les abris de fortune, l’arrivée difficile en Arménie, leur désir de retourner sur leur terre qu’ils aiment tant. Et tout ce qu’ils ont perdu, aux mains des azéris : leurs troupeaux, leurs champs, leurs maisons qu’ils ont préféré brûler. « J’ai eu très peur. On s’est vite préparé et on est descendu dans la cave. J’ai aussi eu très peur pour nos soldats… », nous raconte les yeux remplis de larmes, Vahag, âgé de 9 ans.

Le groupe a aussi rendu visite à plusieurs familles logées dans le centre Pyunik pour personnes en situation de handicap à Erevan. « Nous devions ouvrir un hôtel dans le centre, permettant de financer les frais de fonctionnement de l’établissement. Avec la guerre, nous avons mis à disposition les chambres pour des familles d’Artsakh et ce pour une durée indéterminée. Notre force, c’est notre solidarité. Mais sans aide financière, nos ressources s’affaiblissent », nous explique le Président Fondateur, Hakob Abrahamyan.

Face aux nouvelles problématiques liées au logement, l’équipe d’Arménie, Terre de Vie a également souhaité soutenir plusieurs familles dans le besoin, en leur adressant une aide de 300 euros, leur permettant de vivre deux mois supplémentaires en hôtel. Le temps pour eux de penser à leur avenir et à leur retour en Artsakh.

Des visites importantes

Associées à ces missions d’aide humanitaire, les volontaires se sont rendus au Monastère de Dadivank, situé dans la région du Kelbadjar, pour la dernière messe tenue par le père Hovhannès Hovhannisyan. Une journée difficile pour les fidèles qui ne peuvent se résoudre à laisser ce symbole arménien aux mains de l’ennemi. Sur la route, des maisons, des écoles et des centrales électriques brûlent. « En voyant ces images, on se rend compte du drame de la guerre. Et on se sent terriblement impuissants… », nous confie Célia Tassin, bénévole du voyage. Puis sur le retour vers Erevan, les bénévoles se rendent au cimetière militaire de Yerablur. « Nous voulons rendre hommage à tous les soldats que nous avons perdus. La plupart d’entre eux étaient de jeunes hommes, à peine âgés de plus de 20 ans. C’est toute une génération qui s’éteint. Nous, diaspora, nous devons être là pour ceux qui restent. Nous devons rester unis, ne former qu’une seule et grande nation et continuer notre combat. Car il s’agit de la survie de notre peuple », nous confie Taline Adjemian, volontaire du voyage. Enfin, les bénévoles ont eu l’occasion de se rendre à l’Hôpital d’Erevan, pour rencontrer des blessés victimes des bombes au phosphore. Des cadeaux sont distribués aux soldats, les échanges sont courts et pudiques mais importants. « Nous voulons leur dire que nous les soutenons. Que le monde ne les oublie pas. Et qu’il est de notre devoir d’informer la communauté internationale des conséquences terribles de l’utilisation d’armes chimiques pourtant interdites », nous explique Laura Bal.

Un nouveau départ pour bientôt

Suite à ce voyage, les bénévoles s’accordent tous pour dire qu’ils souhaitent revenir au plus vite en Arménie, pour continuer à soutenir les familles déplacées, mais aussi à Stepanakert en Artsakh, pour aider celles qui souhaitent se réinstaller. L’objectif pour eux est de trouver le plus de fonds possible, tout au long de l’année, pour pouvoir financer des projets de réinsertion sur le long terme, comme l’achat de vaches laitières pour des familles, permettant ainsi de créer des petites économies circulaires. « Nous devons construire un projet solide, ayant un impact pour ces familles sur les mois, les années qui viennent. Nous devons nous investir financièrement, de manière régulière, pour aider à la reconstruction de ce pays, et aider ces gens à retourner sur la terre de leurs ancêtres », nous explique Arnaud Bal. Le programme Arménie, Terre de Vie souhaite mettre en place sa prochaine édition en Artsakh, à l’été 2021, comme ce fut le cas en 2011 lors de la première édition du programme. Un appel aux volontaires sera lancé très bientôt par le programme, dans l’espoir d’apporter une aide concrète aux populations les plus durement touchées par ce drame.

Cet article a été publié dans les Nouvelles d'Arménie Magazine n°280